la méthanogenèse

methanogenesis; methanogenese; archaeome; gut microbiome; ami-hd; brugere; archaea; archées; Methanomassiliicoccales; archaebiotics; TMAO; trimethylamine; methylamine; TMA
Ce que savent faire les archées...
....Et que les autres ne savent pas faire... 


Chaque domaine du vivant ou des groupes d'organisme possède des caractéristiques métaboliques variables, et parfois qui lui sont propres. Il en est une très particulière, la METHANOGENESE que l'on ne retrouve que chez les archées, et encore... que quelques unes, d'où leur nom d'archées méthanogènes ou des "méthanogènes" tout simplement. 

Entendons nous bien sur les mots : la méthanogenèse signifie littéralement  "fabrication de méthane".  Certains organismes autres que des archées en fabriquent de par leur métabolisme MAIS il s'agit de produits secondaires de leur métabolisme.

La méthanogenèse au sens employé par les biologistes fait appel à la notion d'un métabolisme essentiel / obligatoire, car permettant in fine de générer de l'ATP (molécule de stockage d'énergie dans le vivant).  Le méthane n'est autre qu'une sorte de "déchet" d'une voie permettant des transferts d'électrons. Nous verrons plus loin un peu mieux comment cela peut fonctionner.


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Les méthanogènes  participent ainsi au cycle du carbone dans la nature, c'est à dire les différentes formes sous lesquelles les atomes de carbone sont rencontrés dans la nature. Ces formes changent, (bio) transformées en particulier par les différents organismes vivants.

  • Le méthane est un puissant gaz à effet de serre (GES), plus de 20 fois supérieur à l'effet du CO2. Même si ce n'est pas la seule origine du méthane dans l'atmosphère, ce gaz est produit à grande échelle naturellement par les archées méthanogènes qui vivent dans différents environnements naturels. Parmi ces environnements, il ne faut pas oublier le tractus gastro-intestinal de nombreux animaux dont... les termites ! Mais également les ruminants, dont l'exploitation humaine de cheptels augmente actuellement, et avec, la production de méthane sur terre. Trouver des moyens de limiter la présence de ces archées méthanogènes et leur activité méthanogène sont donc d'importance dans le contexte de réchauffement global de notre planète en attendant que... moins de viande soit aussi consommée par l'humanité.

  •  A l'inverse, produire du méthane de manière biologique peut aussi être une solution dans un contexte de raréfaction des énergies fossiles, avec de multiples avantages. Tout d'abord, cela peut permettre de réduire / recycler des déchets organiques générant du gaz carbonique, gaz à effet de serre : celui-ci peut alors être converti par les archées méthanogènes en méthane utilisable comme source d'énergie par l'homme. Ainsi voyons nous des "méthaniseurs", notamment dans des exploitations agricoles, permettant de les chauffer, etc..., par cette fabrication naturelle de biométhane.

  • Aussi, on soupçonne ce métabolisme d'être très ancien, l'un des premiers apparu : il doit se réaliser en absence d'Oxygène O2, comme c'était le cas dans les conditions primitives de la vie, et pour certains organismes, cela se fait à partir de composés très simples comme le gaz carbonique CO2 et l'H2. Décortiquer ces voies métaboliques, ces organismes permet de mieux comprendre un métabolisme supposé ancestral, d'imaginer des origines et évolutions du vivant.

Comment ces organismes fabriquent-ils du méthane ?

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Selon les archées, le méthane est fabriqué à partir de différents "substrats" et selon différentes modalités : De manière simplifiée, on peut définir 3 grandes voies métaboliques différentes.
  • jusqu'à peu, on imaginait les méthanogènes comme tous capables d'utiliser le CO2 et l'Hydrogène H2. L'hydrogène servant de donneur d'électron, on parle de méthanogenèse HYDROGENOTROPHE. Rares étaient les exceptions à ce mode de méthanogenèse (en bleu ci-contre), si bien que cette méthanogenèse était considérée comme le moyen le plus ancien inventé par le vivant pour le métabolisme énergétique de méthanogenèse. On le croyait également présent, au moins à l'état de relique, chez tous les méthanogènes. Nos travaux parus en 2012-2014 ont néanmoins contribué à remettre en cause cette vision, à la vue du contenu génique des génomes de Methanomassiliicoccales et de leur métabolisme (voir chapitre suivant).
  • Quelques rares espèces, affiliées entre elles et regroupées au sein d'un seul ORDRE méthanogène, peuvent également utiliser l'Acétate, une molécule à 2 carbones, ce qui d'une manière caricaturale, équivaut à avoir 1 CO2 (cas précédent) et un un autre devenant "directement" du méthane. On parle de méthanogenèse acétotrophe, mais plus clairement de méthanogenèse ACETICLASTIQUE, montrant bien la "rupture en 2" (claste) de l'acétate.
  • enfin, d'autres méthanogènes (également "rares" et  présents dans un seul ordre d'archées peuvent également s'abstenir de la présence d'H2 et utiliser directement des composés "méthylés", comme par exemple le méthanol ou les méthylamines. On parle de méthanogenèse METHYLOTROPHE. Ce processus est complexe et s'accomplit sans apport d'H2, avec des réactions "reverse" de la méthanogenèse hydrogénotrophe.Un dérivé de cette méthanogenèse, mais qui nécessite l'apport d'H2 (à l'inverse, qui ne nécessite pas les voies de méthanogenèse hydrogénotrophe) est expliqué dans les rubriques archées méthanogènes et microbiote intestinal et dans la partie santé archaebiotics


Notre perception des archées méthanogènes a profondément évolué ces dernières années. A ce monde décrit ci-dessus sont venues se greffer des espèces de filiation très différentes ... Jusqu'en 2015-2016, les archées méthanogènes présentaient toutes la caractéristique d'appartenir à un seul et même phylum, le niveau de classification just'en dessous du domaine: elles étaient toutes des EURYARCHAEOTES, ce qui n'est plus vrai. Par ailleurs, jusque vers les années 2010, on déterminait 5 ordres méthanogènes dans le phylum des Euryarchaeota. Un 6e, puis un 7e ordre furent découverts, notamment à partir des méthanogènes retrouvés dans le tube digestif humain (voir nos travaux, article de 2008). Enfin, ce 7e ordre méthanogène d'alors (maintenant appelé Methanomassiliicoccales) présentait l'originalité de n'avoir aucun des gènes pour réaliser une méthanogenèse hydrogénotrophe (à partir de CO2 et d'H2). Pour autant, cela ne l'empêche pas de dépendre du H2  (par définition, d'être ainsi hydrogénotrophe) tout en réalisant l'équivalent d'une méthanogenèse méthylotrophe....... La classification métabolique actuelle de la méthanogenèse méritera d'être revue prochainement à la connaissance de ces organismes récemment découverts.